Le Thymome chez l’enfant : à propos d’un cas clinique
M Kmari (kmarimohamed at yahoo dot fr) #, A Ourrai, A Hassani, R Abilkassem, A Agadr
Service de pédiatrie, Hôpital militaire Mohamed V, Rabat, Maroc
# : auteur correspondant
DOI
//dx.doi.org/10.13070/rs.fr.5.2595
Date
2018-06-10
Citer comme
Research fr 2018;5:2595
Licence
Résumé

Introduction : Le thymome est une tumeur du médiastin antérieur à développement lent et peu symptomatique. Elle est rare chez l’enfant. Observation : Il s’agissait d’un enfant âgé de 13 ans, sans antécédent particulier, admis pour exploration d’une masse médiastinale antérieure, révélée par des douleurs thoraciques intermittentes. La radiographie pulmonaire montrait une opacité médiastinale antérieure. Le scanner thoracique objectivait une lésion de densité tissulaire ovalaire bien limitée du médiastin antérieur. La biopsie scanno-guidée a permis de confirmer le diagnostic d’un thymome. Le patient a eu une thymomectomie avec bonne évolution clinico-radiologique. Conclusion : Le thymome reste est une tumeur exceptionnelle chez l’enfant, de découverte fortuite dont le traitement est basé sur la chirurgie.

English Abstract

Introduction: The thymoma is a tumor of the anterior mediastinum with slow development. It is rare in children. Case: a 13-year-old child, with no medical history, admitted for exploration of anterior mediastinal mass, revealed by intermittent chest pain. The chest x-ray showed anterior mediastinal opacity. The chest CT scan revealed a well-defined oval tissue density lesion of the anterior mediastinum. The scan-guided biopsy confirmed the diagnosis of a thymoma. The patient had a thymomectomy with good clinico-radiological evolution. Conclusion: The thymoma remains is an exceptional tumor in children. The treatment is based on surgery.

Introduction

Les thymomes sont des tumeurs du médiastin antérieur, provenant de l'épithélium thymique [1]. Ils se produisent plus fréquemment entre les quatrième et sixième décennies de la vie [1, 2]. Chez les enfants, ils sont rares, représentant 5% des masses médiastinales, avec seulement quelques cas rapportés chez des patients de moins de 15 ans [3, 4]. Dans la population pédiatrique, la plupart des tumeurs localisées au médiastin sont d'origine neurogène ou lymphatique, et le les thymomes représentent une minorité de cas [5].

Le Thymome chez l’enfant : à propos d’un cas clinique  Figure 1
Figure 1. Importante opacité médiastinale antérieure gauche à limite externe convexe et régulière.

A travers l’observation d’un enfant âgé de 13 ans et d’une revue de la littérature, nous proposons de faire le point sur les particularités cliniques, thérapeutiques et évolutives de cette tumeur.

Le Thymome chez l’enfant : à propos d’un cas clinique  Figure 2
Figure 2. Tomodensitométrie thoracique : masse médiastinale antéro-supérieure et moyenne gauche.
Observation 

Y. garcon âgé de 13 ans, sans antécédents particulier hospitalisé au service de pédiatrie pour prise en charge d’une douleur thoracique. L’histoire de sa maladie remonte à un mois auparavant, par l’installation douleurs thoraciques antérieures gauche à type de point de coté intermittente avec une dyspnée au repos cédant spontanément le tout évoluant dans un contexte d’apyrexie et de conservation de l‘état général . L’examen à l’admission trouvait un enfant, apyrétique eupnéique, l’examen pleuro- pulmonaire ainsi que cardiovasculaire étaient sans particularité. La radiographie du thorax (Figure 1) montrait une opacité homogène convexe vers le poumon gauche dont la limite interne est noyée dans le médiastin antérieur sans lésions parenchymateuses. L’échographie trans-thoracique était sans particularité. Le bilan radiologique a été complété par un scanner thoracique (Figure 2) objectivant la présence au niveau du médiastin antérieur et moyen gauche d’une masse de densité tissulaire de forme ovalaire de contours réguliers mesurant 37x52x58mm, sans lésions parenchymateuses ni adénopathies ni lésions vertébrales associées. Le bilan biologique n’avait pas objectivé d’anomalies au niveau de la numération formule sanguine, les dosages de l’alpha-foeto-protéine et de la bHCG sont revenus normaux. L’étude anatomo-pathologique de la biopsie de la masse tumorale, réalisée sous contrôle tomodensitométrique, montrait une prolifération tumorale d’architecture lobulée, avec de nombreux septa fibreux. Cette prolifération est faite de tissu lymphoïde, avec de rares corps de Hassel, avec de nombreux amas de cellules épithéliales fusiformes évoquant un thymome à prédominance lymphocytaire. L’étude immuno-histochimique était réalisée confirmant le diagnostic d’un thymome de type AB. Le bilan d’extension s’est avéré négatif. Le patient a bénéficié d’une thymomectomie (Figure 3). Les suites opératoires ont été simples. L’examen anatomo-pathologique définitif de la pièce opératoire ainsi que l’étude immuno-histochimique ont permis de retenir le diagnostic de thymome de type AB. L’évolution post-opératoire du patient était bonne sur le plan clinique ainsi que radiologique.

Le Thymome chez l’enfant : à propos d’un cas clinique  Figure 3
Figure 3. Aspect macroscopique de la pièce de thymomectomie.
Discussion 

Le thymome est une tumeur exceptionnelle chez l’enfant. Le sex-ratio est proche de 1 [6]. Le thymome est souvent asymptomatique, ce qui explique un diagnostic le plus souvent fortuit, évoqué devant une masse médiastinale antéro-supérieure à la radiographie du thorax [7]. Parfois, devant des symptômes peu spécifiques, les plus fréquents sont : l’inconfort et la douleur thoracique rétro-sternale, la toux, la dyspnée, l’amaigrissement et la paralysie diaphragmatique. Un syndrome cave supérieur peut se voir en cas de grosse tumeur compressive [6, 7]. Par ailleurs, devant une symptomatologie auto-immune, notamment une myasthénie grave, le diagnostic doit être évoqué, puisque cette affection est associée au thymome dans près de 25 % des cas chez l’adulte, mais moins de 10 % chez l’enfant [6]. La confirmation du diagnostic passe par une imagerie adaptée. La tomodensitométrie thoracique est l’examen de choix. Elle montre une masse polylobée se développant aux dépens de la loge thymique et recherche un éventuel envahissement locorégional (plèvre, péricarde, gros vaisseaux…). La recherche de maladie auto-immune est orientée selon les symptômes [7]. Le bilan doit être complété par un dosage sanguin de l’alpha-foeto-protéine et de la bHCG (hormone chorionique gonadotrope) pour éliminer une éventuelle tumeur germinale non séminomateuse [7].

Différentes classifications histologiques des thymomes ont été proposées. La plus utilisée est celle de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) de 2004 qui divise les thymomes en sous-types en fonction de la population lymphocytaire et de la présence d’atypies cellulaire (A, AB, B1, B2, B3, C) [8]. Le risque de récidive après exérèse augmente statistiquement des groupes A à C. La classification de Masoaka est une autre classification qui prend en compte le degré d’envahissement local [9].

Le thymome est caractérisé par une évolution lente. Son pronostic dépend de plusieurs facteurs [6] :

Le stade de la tumeur, l’existence d’une invasion microscopique de la capsule, l’envahissement des gros vaisseaux, le type histologique, la qualité de la résection chirurgicale, l’efficacité´ du traitement, et l’association avec une érythroblastopénie. La présence d’une myasthénie, anciennement considérée comme un facteur de mauvais pronostic, ne l’est plus du fait d’une meilleure prise en charge médicale de la maladie.

Les options de traitement pour un thymome comprennent la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie. La résection chirurgicale complète est le traitement de choix. La radiothérapie doit être utilisée dans les tumeurs, incomplètement réséqués; cependant, elle devrait être évitée, si possible, chez les enfants en raison de sa morbidité. La chimiothérapie est réservée pour le traitement de la maladie métastatique, en cas de rechute, ou maladie persistante d’où l’intérêt d’un suivi [10].

Malgré l'occurrence rare dans le groupe d'âge pédiatrique, les thymomes devraient être considérés dans le diagnostic différentiel d'une masse médiastinale antérieure.

Conclusion

Le thymome est une cause rare de tumeur médiastinale chez l’enfant. Sa découverte est le plus souvent fortuite et son évolution est souvent lente. Une imagerie adaptée, complétée par une biopsie chirurgicale, paraît indispensable avant toute décision thérapeutique.

Déclaration
Conflits d’intérêts

Les auteurs ne déclarent aucun conflits d’'intérêts.

Contributions des auteurs

Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

Références
  1. Lewis J, Wick M, Scheithauer B, Bernatz P, Taylor W. Thymoma. A clinicopathologic review.. Cancer. 1987;60:2727-43 pubmed
  2. Lara P. Malignant thymoma: current status and future directions. Cancer Treat Rev. 2000;26:127-31 pubmed
  3. Honda S, Morikawa T, Sasaki F, Okada T, Naito S, Itoh T, et al. Cystic thymoma in a child: a rare case and review of the literature. Pediatr Surg Int. 2007;23:1015-7 pubmed
  4. Lam W, Chan F, Lau Y, Chau M, Mok C. Paediatric thymoma: unusual occurrence in two siblings.. Pediatr Radiol. 1993;23:124-6 pubmed
  5. Rothstein D, Voss S, Isakoff M, Puder M. Thymoma in a child: case report and review of the literature. Pediatr Surg Int. 2005;21:548-51 pubmed
  6. Ashraf V, Taly A, Veerendrakumar M, Rao S. Myasthenia gravis in children: a longitudinal study. Acta Neurol Scand. 2006;114:119-23 pubmed
  7. Le Pechoux C, Mahe M, Bretel J, Roberti E, Ruffie P. [Thymic tumors]. Cancer Radiother. 2005;9:351-7 pubmed
  8. Rod J, Orbach D, Vérité C, Coze C, Stephan J, Varlet F, et al. Surgical management of thymic epithelial tumors in children: lessons from the French Society of Pediatric Oncology and review of the literature. Pediatr Blood Cancer. 2014;61:1910-5 pubmed publisher
  9. Masaoka A, Monden Y, Nakahara K, Tanioka T. Follow-up study of thymomas with special reference to their clinical stages.. Cancer. 1981;48:2485-92 pubmed
  10. Dhall G, Ginsburg H, Bodenstein L, Fefferman N, Greco M, Chang M, et al. Thymoma in children: report of two cases and review of literature. J Pediatr Hematol Oncol. 2004;26:681-5 pubmed
ISSN : 2334-1009