Anatomie pathologique des sarcomes retro péritonéaux
Issam Rharrassi (rharras55 at gmail dot com) #, Adil Boudhas, A Albouzidi
Service d’anatomie pathologique de l’hôpital militaire Mohamed V, Rabat, Maroc
# : auteur correspondant
DOI
//dx.doi.org/10.13070/rs.fr.3.1542
Date
2016-06-30
Citer comme
Research fr 2016;3:1542
Licence
Résumé

Les sarcomes du rétropéritoine sont des tumeurs rares. Ils représentent 0,5 à 1 % des tumeurs malignes et 12 % des sarcomes des tissus mous. Le diagnostic est évoqué à l’imagerie : tomodensitométrie thoraco-abdominale avec reconstruction 3D. La biopsie permet de porter un diagnostic de certitude. Elle est indispensable avant toute décision thérapeutique. Les sarcomes les plus rencontrés dans le rétropéritoine sont : le liposarcome, le léiomyosarcome, et l’histiocytofibrome malin. Les autres formes histologiques sont les fibrosarcomes, rhabdomyosarcomes, synovialosarcomes, sarcomes d’Ewing, tumeurs malignes d’origine nerveuse. L’immuno-marquage est utile au diagnostic. Certains sarcomes expriment des remaniements chromosomiques spécifiques. Quelle que soit la forme histologique, les sarcomes sont gradés selon les critères définis par la FNCLCC (Fédération Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer). L’importance du grade dans les sarcomes rétropéritonéaux est fonction du type histologique. Le rôle de l’urologue est d’évoquer, de confirmer le diagnostic, puis de participer à une prise en charge multidisciplinaire qui sera au mieux réalisée en centre référent après discussion des modalités thérapeutiques en comité RCP régional.

English Abstract

Retroperitoneal sarcomas are rare. They represent 0.5 to 1% of malignant tumors and 12% of soft tissue sarcomas. Sarcomas most encountered in the retroperitoneum are: liposarcoma, leiomyosarcoma, and malignant fibrous histiocytoma. Other histological forms are fibrosarcoma, rhabdomyosarcoma, synovialosarcomes, Ewing's sarcoma, and malignant tumors of nervous origin. The immunochemistry is useful for diagnosis. Some sarcomas express specific chromosomal rearrangements. Whatever the histological form, sarcomas are graded according to the criteria defined by the FNCLCC (Fédération Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer). The importance of the grading in retroperitoneal sarcomas depends on the histological type. The role of the urologist is to evoke, to confirm the diagnosis and to participate in a multidisciplinary approach that will be best performed by referral center after discussion of therapeutic modalities.

Introduction

Les sarcomes rétropéritonéaux (SRP) des parties molles sont des tumeurs très rares, développées aux dépens de cellules souches mésenchymateuses. Ils représentent 0,5 à 1 % des tumeurs malignes et 12 % des sarcomes des tissus mous [1]. Il s’agit de tumeurs le plus souvent sporadiques, mais il existe des formes radio-induites. Des formes associées à des maladies génétiques ont été rapportées. Les sous-types histologiques les plus fréquents sont les liposarcomes, les léiomyosarcomes, les histiocytomes fibreux malins et les fibrosarcomes.

Ce sont des tumeurs parfois d'allure faussement bénigne et de pronostic sévère. Toute tumeur rétro péritonéale doit être considérée comme suspecte de sarcome des parties molles. Leur stratégie diagnostique et thérapeutique est complexe, définie et appliquée de préférence en centre expert. La qualité de la prise en charge conditionne le pronostic.

Bilan

Les symptômes ne sont pas spécifiques. Ils sont présents chez la majorité des patients et sont en rapport avec le volume tumoral élevé. Il peut s’agir :

  • -d’une pesanteur lombo-abdominale ;
  • -de la découverte d’une masse abdominale ;
  • -de signes compressifs viscéraux (sub-occlusion), neurologiques (cruralgie) ou vasculaires (varicocèle) ;
  • -d’une altération de l’état général.

La découverte d’une tumeur rétro péritonéale des tissus mous doit faire craindre un sarcome retropéritonéal (SRP). Le bilan comporte un examen clinique complet, un scanner thoraco-abdomino-pelvien et une IRM. La tumeur se présente sous la forme d’une masse tissulaire rétropéritonéale qui refoule les viscères de voisinage sans les envahir. La densité graisseuse est caractéristique d’un liposarcome différencié, mais peut être absente s’il s’agit d’un liposarcome dédifférencié ou d’une autre variété histologique. En cas de proximité vasculaire, une angio-IRM est recommandée.

La biopsie pré-opératoire n’est pas systématique, en particulier lorsqu’une exérèse complète semble possible. Le prélèvement s’effectue sous repérage radiologique (TDM voire échographie), par voie rétro péritonéale exclusive. Le matériel prélevé doit être en quantité suffisante pour une analyse complète (microscopie, immunomarquage, congélation pour étude biologique moléculaire le cas échéant).

Les prélèvements et l'ensemble des renseignements clinico-radiologiques sont nécessaires à l'anatomopathologiste pour poser un diagnostic.

Classification des sarcomes rétropéritonéaux

Les sarcomes des tissus mous sont classés en fonction de leur ressemblance avec les tissus sains. Les sarcomes les plus rencontrés dans le rétropéritoine sont : Le liposarcome, le léiomyosarcome, et l’histiocytofibrome malin. La classification de la dernière édition de l’OMS [2] suit la même organisation que la précédente : tumeurs adipeuses, fibroblastiques /myofibroblastiques, dites fibrohistiocytaires, musculaires lisses, péricytaires/ péri vasculaires, musculaires striées, vasculaires, chondro-osseuses, de différenciation incertaine. De nouveaux chapitres sont apparus dans cette édition : les chapitres dédiés aux tumeurs stromales gastro-intestinales et aux tumeurs des gaines nerveuses périphériques qui étaient avant inclus dans d’autres volumes. Un chapitre a été ajouté : celui des sarcomes indifférenciés/inclassés. Quelques principes généraux ont été appliqués dans cette nouvelle classification : 4 catégories d’évolutivité des tumeurs conjonctives : les lésions bénignes, les tumeurs à potentiel de récidive locale, les tumeurs à potentiel métastatique faible, et les sarcomes. Lorsqu’une anomalie moléculaire caractéristique d’une entité a été identifiée, la définition de cette entité est à la fois histologique et moléculaire.

Certains marqueurs immuno-histochimiques et techniques spéciales ont été retirées de cette édition : comme la vimentine, le bcl2, le CD10, le CD56, FLi1, WT1, le CD99 en dehors des tumeurs à cellules rondes.

Eléments pronostiques

La plus importante série récente de la littérature a colligé 500cas de SRP [3], dont 278 patients porteurs de tumeur primitive.

Les facteurs de risque de mortalité spécifique en analyse multivariée étaient :

  • - le grade tumoral (haut grade vs bas grade)
  • - la taille tumorale (plus ou moins de 10 cm)
  • - la présence ou l’absence de marges chirurgicales macro ou microscopiques

L’impossibilité de réaliser l’exérèse était un facteur de risque majeur. Dans une série plus petite, Alldinger [4] a confirmé le caractère péjoratif des tumeurs de haut grade ou d’exérèse incomplète. Il existe plusieurs systèmes d’évaluation du grade histologique. En France, le système adopté par la FNCLCC comporte trois critères : la différenciation tumorale, l’index mitotique et la nécrose tumorale, cotées pour établir un score global de 2 à 8, réparti ensuite en grade 1,2 ou 3 [5]. L’American Joint Committee on Cancer a établi un score de 1 à 4 en fonction du degré de différenciation [6].Tous les auteurs insistent sur la nécessité de recourir à un pathologiste habitué à ces tumeurs.

L’importance du grade dans les sarcomes rétropéritonéaux est fonction du type histologique. Par exemple, le risque métastatique reste modéré dans les liposarcomes dédifférenciés, quelque soit le grade qui y est retrouvé ; en revanche les leiomyosarcomes du rétropéritoine partagent un mauvais pronostic quelque soit le grade attribué.

Etude analytique des principaux sarcomes du rétro péritoine

Cet article a pour but de rapporter les mises à jour et nouveautés en fonction des principales entités des sarcomes retropéritonéaux.

Le liposarcome

Représente 50 % des sarcomes du rétro péritoine. La caractéristique histologique est la présence d’adipocytes.

Il existe 3 familles de tumeurs adipeuses malignes qui présentent des caractéristiques clinico pathologiques et moléculaires différentes et spécifiques :

  • -les tumeurs adipeuses atypiques ou liposarcomes (LPS) bien différenciés/LPS dédifférenciés ;
  • -LPS myxoïdes / à cellules rondes ;
  • -LPS pléomorphes.
LPS bien différenciés/LPS dédifférenciés

Représentent la majorité des liposarcomes. Ces sarcomes ont en commun un profil génomique simple caractérisé par une amplification de la région 12q14-15 impliquant le gène MDM2.Sur le plan cytogénétique, ces tumeurs comportent un ou deux chromosomes géants ou en anneaux surnuméraires appelés « chromosomes marqueurs ». Ce sont ces chromosomes marqueurs qui comportent les séquences amplifiées. Plus récemment, il a été montré que le gèneHMGA2, également amplifié dans les lipomes ordinaires est constamment co-amplifié avec MDM2 alors que le gène CDK4 localisé en 12q14.1 plus centromérique appartient à un autre amplicon co-amplifié avec MDM2 et HMGA2 dans 90 %des cas. Ces critères sont actuellement utilisés en pratique courante et la FISH et l’analyse immuno-histochimique à la recherche d’une amplification de MDM2 et CDK4 sont nécessaires au diagnostic .CDK4 est amplifié de façon indépendante de MDM2 ; cette amplification n’est pas obligatoire et est observée dans 90 %des cas. CDK4 code pour une protéine de 33kd qui joue un rôle clé dans la régulation de la transition G1-S en collabo-ration avec Rb1.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 1
Figure 1. Liposarcome bien différencié .
LPS bien différenciés

Pour les localisations rétro péritonéales, médiastinales et para testiculaires, le terme de liposarcome bien différencié est préféré à celui de tumeur adipeuse atypique (TAA) en raison du risque très important voire inévitable de récidive locale et de la morbidité essentiellement lié à l’impossibilité de résection chirurgicale large.

Macroscopiquement (Fig1), des bandes fibreuses épaisses peuvent être observées et séparent des lobules dont la couleur varie du jaune (mou) au blanc (plus ferme) en fonction de la proportion des contingents adipeux et fibromyxoïdes.Des zones remaniées, nécrotiques sont fréquentes dans les tumeurs de grande taille. Sur le plan histologique, trois variantes sont classiquement décrites sans incidence clinique ni pronostique. Elles sont souvent mélangées au sein d’une même tumeur. Il s’agit du type adipocytaire « lipoma-like », du type sclérosant et du type inflammatoire.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 2
Figure 2. Liposarcome bien différencié « lipoma-like »: rares cellules stromales atypiques (HE, G×20). Annales de pathologie (2015) 35, 41—53
  • -La variante lipoma-like:

    Caractérisée par des adipocytes matures (Fig2) de taille irrégulière comportant au moins focalement des atypies nucléaires avec des noyaux volumineux hyperchromatiques et une proportion variable de cellules stromales fusiformes ou multinucléées au noyau atypique hyperchromatique et qui doivent être recherchées dans les septa fibreux. Cette variante pose le problème de diagnostic différentiel avec un lipome éventuellement remanié. Le siège de la tumeur est crucial. Au niveau du retro péritoine, il s’agit en règle d’un LPS bien différencié tandis qu’au niveau du péritoine en particulier le pelvis, on peut observer des lipomes de grande taille. La positivité quasi constante des cellules atypiques pour le MDM2 (Fig3) et le CDK4 (Fig4) constitue une aide diagnostique importante.

    Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 3
    Figure 3. Liposarcome bien différencié : marquage nucléaire pour MDM2 (Gx20). Annales de pathologie (2015) 35, 41—53.
  • -La variante sclérosante :

    Plus fréquente dans le rétro-péritoine et en paratesticulaire, est caractérisée par des zones fibreuses denses alternant avec des zones adipocytaires (Fig5). Le liposarcome sclérosant doit être distingué d'un liposarcome myxoïde en cas de remaniements oedémateux surajoutés, d'un liposarcome pléomorphe, d'un lipome à cellules pléomorphes et des divers processus fibro-inflammatoires bénins du rétropéritoine ou de l’abdomen comme la maladie d’Ormond ou les mésentérites.

    Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 4
    Figure 4. Liposarcome bien différencié: marquage nucléaire pour CDK4 (Gx20).
  • -La variante inflammatoire:

    La forme inflammatoire survient presque exclusivement dans le rétro péritoine et comporte un infiltrat inflammatoire important lympho-plasmocytaire sur un fond adipeux ou sclérosant.

L’inflammation peut être majeure et masquer les cellules tumorales.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 5
Figure 5. Liposarcome bien différencié sclérosant : cellules stromales multinucléées dans un stroma fibromyxoïde (HE, ×20).
LPS dédifférenciés :

Deuxièmes liposarcomes en fréquence après les LPS bien différenciés ; siègent principalement dans le rétro péritoine et en para testiculaire. Ils sont exceptionnellement superficiels. Environ 90 % surviennent de novo et 10 % lors de la récidive d’un liposarcome bien différencié. Le risque de dédifférenciation dépend de la durée d’évolution et de la localisation de la tumeur : il est de 20 % pour les tumeurs du rétro péritoine et de 5 % pour les tumeurs des membres.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 6
Figure 6. Liposarcome dédifférencié : cellules fusiformes et pléomorphes indifférenciées (HE, ×20). Annales de pathologie (2015) 35, 41—53.

Histologiquent : présence au sein d’un LPS bien différencié de secteurs sarcomateux non adipocytaires. Le contingent bien différencié peut être absent. Les secteurs dédifférenciés sont souvent de haut grade ressemblant à un sarcome pléomorphe indifférencié ou un myxofibrosarcome (Fig6) .Des zones dédifférenciées de bas grade sont également possibles (fibromatose ou fibrosarcome). Une différenciation hétérologue est observée dans 5 à10 % des cas sans incidence sur le pronostic. De rares formes méningothéliales ont été décrites (Fig7). Récemment, des cas de liposarcome dédifférencié avec différenciation homologue de type liposarcome pléomorphe ont également été rapportés.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 7
Figure 7. Liposarcome dédifférencié avec éléments méningothéliomateux (HE, ×20). Annales de pathologie (2015) 35, 41—53.
LPS myxoïdes/cellules rondes:

Représentent environ un tiers des LPS et touchent des sujets plus jeunes que pour les autres LPS avec un pic dans la 5e décennie. Des localisations sous-cutanées et rétro péritonéales ont été rapportées mais sont extrêmement rares. L’étude immuno-histochimique n’apporte pas d’aide au diagnostic positif. L’analyse cytogénétique par FISH à la recherche d’une amplification MDM2 et CDK4 pour les LPS bien différenciés ou à la recherche d’une translocation impliquant DDIT3 dans les LPS myxoïdes est d’une grande aide.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 8
Figure 8. Liposarcome myxoïde : bonne délimitation avec les tissus adjacents, renforcement périphérique de la cellularité, lipoblastes de petite taille contenant une vacuole unique (HE, ×20). Annales de pathologie (2015) 35, 41—53.

Histologiquement: Ce sont des tumeurs pauci cellulaires avec une cellularité renforcée en périphérie des lobules. IL existe habituellement une délimitation nette avec les tissus adjacents. Les noyaux sont monotones sans atypies ni activité mitotique marquée (Fig8). D’assez nombreux lipoblastes uni- ou multivacuolisés sont observés en périphérie des lobules. Il existe un réseau abondant de capillaires plexiformes, arborescent en « patte de poulet» à paroi fine, élément clé du diagnostic. Ces LPS myxoïdes peuvent perdre leur différenciation et des secteurs à cellules rondes apparaissent soit sous forme d’un nodule cellulaire à cellules rondes avec transition abrupte ou le plus souvent progressive avec les secteurs myxoïdes (Fig9). Dans les secteurs à cellules rondes, les cellules tumorales arrondies présentent des noyaux nucléolés et sont disposés les uns contre les autres, avec images de superposition nucléaire sans interposition de stroma entre les cellules. Le stroma vasculaire devient presque impossible à identifier. L’IHC n’est d’aucune aide au diagnostic et celui-ci repose sur la mise en évidence de la translocation réciproque impliquant DDIT3 et FUS ou rarement EWSR1.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 9
Figure 9. Liposarcome myxoïde de haut grade (« à cellules rondes ») (HE, ×20).Annales de pathologie (2015) 35, 41—53.
LPS pléomorphes:

type histologique le plus rare, représentant environ 5 % des liposarcomes . Défini comme un sarcome à cellules pléomorphes contenant des lipoblastes atypiques en nombre variable (Fig10). Il ne présente pas de secteurs de type liposarcome bien différencié ni d’autres lignes de différenciation. L’étude immunohistochimique n’apporte pas d’aide au diagnostic positif mais permet d’éliminer les diagnostics différentiels tel un éventuel carcinome sarcomatoïde notamment rénal, une tumeur musculaire (actine, desmine,caldesmone, myogénine) ou une éventuelle tumeur stromale gastro-intestinale (GIST) (CD117+, DOG1+) . En particulier, il n’est pas noté d’expression de MDM2 et CDK4.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 10
Figure 10. arcome pléomorphe : transition entre une composante épithélioïde peu différenciée et des nappes de lipoblastes (HE, ×10). Annales de pathologie (2015) 35, 41—53.
Le léiomyosarcome

Le léiomyosarcome est rencontré dans 18 % des cas. Il peut se développer dans l’espace rétro péritonéal, sur la veine cave ou une autre structure vasculaire. Les léiomyosarcomes rétro péritonéaux sont caractérisés par un pronostic très péjoratif, avec un risque local et surtout métastatique très élevé. Surviennent surtout chez la femme au niveau du retro péritoine et sont de plus petite taille que les liposarcomes dédifférenciés.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 11
Figure 11. Léiomyosarcome moyennement différencié.

Macroscopiquement: Sur la tranche de section, la tumeur est plus ou moins limitée, blanc-grisâtre et fasciculée(Fig11). Toutefois les tumeurs de grande taille sont d’aspect charnu, avec des zones d’hémorragie et de nécrose et rien ne les distingue des autres sarcomes.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 12
Figure 12. Histologie, (G×20, coloration HE) : prolifération assez dense de cellules fusiformes à disposition fasciculée.

Histologiquement : Il s’agit souvent de léiomyosarcomes bien ou moyennement différenciés facilement identifiables par l’histologie(Fig12) et par l’immunomarquage qui montre souvent une positivité franche pour les marqueurs musculaires lisses AML(Fig13), et Caldesmone. Les cellules se disposent en longs faisceaux se coupant à angle droit. Elles ont un cytoplasme abondant éosinophile, souvent fibrillaire, contenant éventuellement une vacuole encochant le noyau. Le noyau est central, à extrémités arrondies « en cigare ». Les noyaux peuvent être irréguliers, polymorphes, plurilobés ou monstrueux. Au niveau retro péritonéal, la présence de 1 à 4 mitoses pour 10 champs à fort grossissement + nécrose + T > 7.5cm indiquent un potentiel malin, tandis que plus de 4 mitoses signent la malignité. Devant ce type de sarcome, il convient d’éliminer systématiquement une tumeur stromale, un LPS dédifférencié ou un léiomyosarcome génital chez la femme en pratiquant des immunomarquages pour CKIT, MDM2 et les récepteurs hormonaux.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 13
Figure 13. Immunohistochimie, (G×10), anticorps anti-actine muscle lisse (AML) : marquage cytoplasmique diffus et intense des cellules tumorales. Journal de Radiologie Diagnostique et Interventionnelle (2012) 93, 64—67.
L’histiocytofibrome malin (MFH)

Correspond à un sarcome indifférencié, dont la fréquence diminue avec les possibilités croissantes de reconnaissance d’une différenciation tissulaire au moins immunohistochimique, sinon moléculaire. Ainsi, la grande majorité des tumeurs autrefois diagnostiquées MFH sont reconnues aujourd’hui comme des liposarcomes dédifférenciés.

Macroscopiquement : Ces tumeurs mesurent en moyenne de 5 à 10 cm mais peuvent être plus volumineuses, en particulier pour les tumeurs rétropéritonéales. Bien ou mal limitées, elles présentent volontiers des zones de nécrose et d’hémorragie à la coupe. Près de 2/3 sont localisés dans les muscles squelettiques. Weiss [7] décrit 4 variétés histologiques d’HFM : storiforme, pléomorphe, myxoïde, à cellules géantes, et inflammatoire. Ce dernier est le plus fréquemment retrouvé en rétropéritonéal.

MFH inflammatoire

Initialement rapporté sous le terme de xanthogranulome rétro péritonéal, cette tumeur a ensuite été rattachée aux MFH. Représente environ 5% de l'ensemble de ces tumeurs. De localisation surtout rétro péritonéale sinon intra-abdominale ou tissus mous profonds .Correspond vraisemblablement à un sarcome dédifférencié de type LPS.

Anatomie pathologique  des sarcomes retro péritonéaux Figure 14
Figure 14. Histiocytofibrome malin (MFH) dans sa variante inflammatoire, (HE ,Gx20), plages de cellules inflammatoires associées à des zones riches en histiocytes spumeux à noyaux pycnotiques ou parfois atypiques

Histologiquement : plages de cellules inflammatoires principalement des polynucléaires neutrophiles associés à des zones riches en histiocytes spumeux à petits noyaux pycnotiques ou parfois atypiques(Fig14). Les cellules tumorales atypiques sont parfois rares et doivent être recherchées avec soin sur plusieurs niveaux de coupe, peuvent évoquer un lymphome, carcinome. Ces cellules tumorales présentent les caractéristiques des cellules observées dans la forme storiforme pléomorphe, mais sont généralement moins atypiques. C’est la forme de plus mauvais pronostic des HFM. En fait la plupart correspond vraisemblablement à un liposarcome dédifférencié (MDM2+, CDk4 +). Le principal diagnostic différentiel est la pyélonéphrite xanthogranulomateuse étendue au péritoine.

Autres sarcomes

Les autres formes histologiques sont les fibrosarcomes, les rhabdomyosarcomes, les synovialosarcomes, le sarcome d’Ewing, les tumeurs malignes d’origine nerveuse, ou un angiosarcome sur tissus irradiés entre autres. L’immuno-marquage est utile au diagnostic. Certains sarcomes expriment des remaniements chromosomiques spécifiques (Tableau 1).

Type Histologique Anomalies chromosomiques
Liposarcome myxoide Liposarcome à cellules rondest (12; 16) (q13.3; p11.2)
Rhabdomyosarcome alvéolairet (2; 13) (q37; q12)
Sarcome d’Ewing PNETt (11, 22) (q13; q12)
Synovialosarcomest (X; 18) (p11, q11)
Tableau 1. Anomalies chromosomiques corrélées au sous type histologique des sarcomes du rétropéritoine.
Conclusion

La dernière édition de l’OMS a été enrichie par les apports de la cytogénétique et de la biologie moléculaire, permettant de mieux définir, classer, rapprocher ou au contraire démanteler certaines tumeurs, voire de décrire de nouvelles entités des sarcomes retropéritonéaux.,Le pathologiste joue un rôle primordial : il est collecteur de tissus tumoraux pour les chercheurs, il applique en même temps aux tumeurs des patients les données les plus récentes de la biologie moléculaire, transposées dans des techniques de réalisation simple, standardisées et souvent automatisées, telles que l’immunohistochimie et l’hybridation in situ. Il permet ainsi aux cliniciens en particuliers les urologues, dans une approche multidisciplinaire, le meilleur choix thérapeutique, et son rôle dans ce choix s’amplifie sans cesse.

Déclaration
Conflits d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Contributions des auteurs

Tous les auteurs ont contribué à la conduite de ce travail. Tous les auteurs déclarent également avoir lu et approuvé la version finale du manuscrit.

Références
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ISSN : 2334-1009