Introduction : Les plaies cardiaques constituent l’exemple type de l’urgence cardiovasculaire. Elles engagent rapidement le pronostic vital. Observation : Nous rapportons l’observation d’un jeune patient de 24 ans, de sexe masculin, admis en urgence pour plaie cardiaque par une barre métallique transfixiante survenue dans un but d’autolyse. Le patient fut opéré en urgence, après un bref bilan radiologique, sous circulation extra corporelle et clampage aortique. Les suites opératoires étaient simples. Le patient a quitté le service à J12. Conclusion : Les plaies cardiaques par agent transfixiant ne tolèrent aucun retard thérapeutique. L’agent transfixiant ne doit être enlevé qu’au bloc opératoire après installation d’une circulation extra-corporelle.
Introduction: Cardiac wounds are the typical example of a cardiac emergency. Not treated rapidly, they are life threatening. Case: We report a 24-year-old man, admitted to the emergency department with cardiac wound caused by a metal bar, inflicted by himself for suicide. The patient was admitted rapidly to the operating room where the extraction of the bar was done under cardio pulmonary bypass. No major event was noted post operatively and the patient leaved the department on day 12. Conclusion: Open cardiac wounds should be treated surgically without any delay. The transfixiant agent should be removed in the operating room under cardio pulmonary bypass.
Les plaies cardiaques par agent transfixiant constituent un défi chirurgical car elles mettent souvent en jeu le pronostic vital. Elles sont dominées par les plaies de la paroi antérieure du ventricule droit (VD). Cependant, toutes les structures cardiaques peuvent être touchées (cavités, vaisseaux, septums, tissu de conduction, valves) [1].
Le cas de plaie cardiaque que nous présentons a trois points originaux:
- - Le traumatisme du VD, du septum inter-ventriculaire (SIV) et du ventricule gauche (VG) a été crée par une barre métallique de 25 cm, qui est restée in situ.
- - Le blessé a été évacué par voie aérienne par la première équipe qui l’a reçu, ne disposant pas d’un plateau technique adéquat et située à plus de 1500 km de notre hôpital.
- - L’état hémodynamique du blessé était stable, contrairement à ce que l’on voit habituellement dans les plaies cardiaques qui se traduisent cliniquement le plus souvent par un état de choc hémorragique (malade blanc) ou une tamponnade (malade bleu). Dans notre observation, la barre rouillée est restée in situ assurant l’hémostase.
L’homme, âgé de 24 ans, a été victime d’un traumatisme thoracique à point d’impact latéro-sternal gauche par barre métallique transfixiante, dans un but d’autolyse (Figure 1). Il a été admis dans le service des urgences, dans un état hémodynamique stable, conscient avec la barre métallique laissée in situ. Le patient nous a été adressé avec une radiographie thoracique et un angio-scanner thoraco-abdominal qui ont montré le caractère transfixiant de la barre métallique qui, selon un trajet oblique de bas en haut, d’avant en arrière et de droite à gauche, pénétrait la paroi libre du VD et sortait par la paroi postérieure du VG (Figures 2- 4) . Il n’y avait pas de lésion associée.
A son admission dans notre hôpital, il était conscient, anxieux et stable sur le plan hémodynamique avec une fréquence cardiaque à 95/min et une pression artérielle à 120/70 mmHg. La barre métallique pointait sous l’appendice xiphoïde et transmettait les battements du cœur, l’auscultation cardiaque et pleuro pulmonaire était normale.
L’examen somatique n’a pas trouvé de lésion associée.
L’électrocardiogramme (ECG) a montré une tachycardie sinusale à 100/min sans signe d’ischémie, ni d’infarctus.
L’échocardiographie transthoracique (ETT) a confirmée les données de l’angio-scanner et a mis en évidence une communication inter ventriculaire (CIV) comblée par le corps étranger. Il n’y avait pas d’épanchement péricardique. Les valves atrio-ventriculaires et ventriculo-artérielles étaient indemnes.
Le patient a été admis au bloc opératoire 40 minutes après son arrivée. Une circulation extracorporelle (CEC) fémoro-fémorale a été mise en route avant la réalisation d’une sterno-péricardotomie médiane verticale. Après clampage aortique, passage de la cardioplégie par la racine aortique et arrêt cardiaque, la barre métallique a été retirée prudemment. Le bilan lésionnel a trouvé l’orifice d’entrée au niveau de la paroi antérieure du VD (Figure 5), l’orifice de sortie au niveau de la paroi postérieure du VG, au ras de l’artère circonflexe et une plaie de la plèvre médiastinale postérieure (Figure 6).
Les plaies du VD et du VG ont été suturées par des points en U appuyés sur patch de péricarde autologue (Figure 7). Une atriotomie droite parallèle au sillon atrio-ventriculaire droit a permis la découverte d’une CIV musculaire d’un centimètre de diamètre, suturée par deux points simples appuyés sur patch de téflon (Figure s 8, 9). La sortie de CEC s’est faite sans problème. Les suites opératoires ont été simples. L’ETT de contrôle à j10 était normale. Le patient a été transféré en psychiatrie pour complément de prise en charge.
Les plaies cardiaques sont le plus souvent une urgence vitale nécessitant une chirurgie adaptée et orientée par un bilan lésionnel aussi complet que possible [1, 2] sans pour autant retarder la sanction chirurgicale qui parfois ne tolère aucun retard. L’angioscanner thoracique est utile chez les patients stables hémodynamiquement, qui doivent être monitorés et étroitement surveillés au moment de la réalisation de l’examen [3].
La vidéothoracoscopie est un outil diagnostique et thérapeutique utile chez les patients présentant une plaie du thorax, stables hémodynamiquement. C’est une alternative à la fenêtre péricardique par voie sous xiphoïdienne, pour l’exploration des plaies de l’aire cardiaque [1, 4]. Le patient instable hémodynamiquement doit être réanimé et opéré sur le champ sans même bilan radiologique [1, 2]. Généralement, la voie d’abord est une thoracotomie antéro-latérale gauche par le cinquième espace intercostale donnant un accès rapide et direct aux ventricules, permettant, si nécessaire, de clamper l’aorte thoracique [1]. Cette chirurgie urgente risque néanmoins de négliger des lésions intra-cardiaques dont l’évolution est imprévisible et qui doivent être évaluées et opérées ultérieurement s’il y a indication. Une CIV post-traumatique peut être fermée par cathétérisme interventionnel si elle est musculaire, à distance des structures valvulaires [5].
Chez notre patient, la barre métallique, gardée in situ, rendait la sternotomie dangereuse. Celle-ci n’a été réalisée qu’après installation d’une CEC fémoro-fémorale de sécurité.
Devant toute plaie cardiaque par agent transfixiant resté in situ, celui-ci ne doit être en aucun cas retiré qu’en peropératoire.
Les plaies cardiaques, malgré leur rareté, sont des urgences extrêmes engageant le pronostic vital et dont le traitement chirurgical devrait être réalisé sans aucun délai.
- Avaro J, Grisoli D, Gariboldi V, Piccardo A, Riberi A, Kerbaul F, et al. [Surgical management of cardiac wounds: cardiac or general surgical service?]. J Chir (Paris). 2008;145:42-5 pubmed
- Jancovici R, Sockeel P, Ranoarivony T, de Kerangal X, Chapuis O, Pons F. [Treatment of cardiac wound]. J Chir (Paris). 2003;140:161-6 pubmed
- Zhang C, Hu J, Ni Y, Xu H. Successful salvage of post-traumatic metallic foreign body partially retained in the posterior papillary muscle of the left ventricle. Interact Cardiovasc Thorac Surg. 2006;5:507-8 pubmed
- Lang-Lazdunski L, Chapuis O, Pons F, Jancovici R. [Videothoracospy in thoracic trauma and penetrating injuries]. Ann Chir. 2003;128:75-80 pubmed
- Pesenti-Rossi D, Godart F, Dubar A, Rey C. Transcatheter closure of traumatic ventricular septal defect: an alternative to surgery. Chest. 2003;123:2144-5 pubmed